Comment voyez-vous la trinité ?

Comme une pure construction théologique pour tenter de définir avec des mots grecs et latins un concept religieux qui, si on est sérieux, ne peut que transcender tout langage humain et même toute logique et toute raison.

Soyons sérieux. Islamistes tendance Deedat, ne lisez pas plus loin, vous ne pourriez pas comprendre, c’est pas à votre portée. On parle de Dieu (ou de « la Divinité » comme disaient les païens qui étaient en réalité aussi monothéistes que les juifs). Que Dieu existe ou non en-dehors de notre imagination est secondaire, ce qui compte c’est le concept de transcendance absolue, c’est à dire une entité qui est au-dessus de ce que le cerveau humain, avec son nombre de neurones limité, peut concevoir. Pourtant il va falloir en parler, essayer de le définir, faire entrer cette transcendance absolue dans les catégories forcément réductrices du langage humain.

Puisque Dieu est impensable, comment peut-il communiquer avec nous? En se révélant, bien sûr, c’est à dire en se mettant à notre portée. Il ne va pas se révéler tel qu’il est, car c’est une vision (c’est à dire une pensée, un concept) que nous ne pouvons pas supporter (c’est à dire concevoir). Il va donc se révéler par des « hypostases », ou en latin des « personnes ». Et ça va varier dans le temps en fonction des publics. Pour les anciens Hébreux, il se révèle sous la forme d’un dieu genre dieu païen, tonnant du haut de sa montagne, dictant des lois à son prophète (comme Shamash dictant ses lois au roi Hammourabi de Babylone).

Et puis les gens changent. Avec l’influence de la culture grecque, il n’y a plus que les Arabes qui soient encore impressionnés par des lois soi-disant divines et assorties de menaces diverses imposées d’une voix forte par un potentat. Les Grecs, les Romains, sont des hommes libres. Pour eux, les lois doivent être votées par le peuple guidé par la Raison. Alors la divinité va se révéler sous une autre hypostase : un être humain comme nous (pour les Grecs et les Romains tous les citoyens sont égaux), qui fera entendre la voix du cœur et de la raison, souffrira les pires souffrances de la condition humaine, puis ressuscitera pour révéler que la vraie nature de l’homme c’est d’être immortel.

Mais gare aux effets secondaires indésirables : à trop écouter le Fils (la 2e hypostase de la Divinité) on risque de l’idolâtrer comme un gourou. Ça en fait du dégât, un gourou ! On se soumet à sa parole, on se prosterne devant sa « sagesse immense », on en perd tout esprit critique en croyant « dépasser son égo« . Et on devient idiot en croyant qu’on est devenu sage. Halte là, la Divinité attend mieux de nous ! Il veut des esprits libres.

Alors il se révèle sous une troisième hypostase, désincarnée : le Saint Esprit. Le Saint Esprit c’est l’esprit de Dieu en nous, c’est lui qui guide notre pensée, nous garantit que nous pouvons y aller, qu’on a le droit de réfléchir, d’avoir un esprit critique, Dieu bénit ce que nous allons déduire. L’esprit saint, c’est le droit de penser sans être paralysé par la peur de s’éloigner de la Révélation.

Voilà comment je perçois la Trinité. Derrière le dieu terrible et babylonien du Sinaï, derrière le philosophe si profondément humain crucifié à Jérusalem, derrière ce que depuis les hommes ont pu construire en réfléchissant (et même, O ironie, en disant ne pas croire en Dieu), il y aurait un seul et même être.

HaCa

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Redire Nicée, Constantinople et Chalcédoine ?

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Littéralisme ou interprétation ?

Les auteurs de la Genèse considéraient-ils déjà celle-ci comme une allégorie ou croyaient-ils vraiment à Adam et Eve et au Déluge?

Je ne peux pas m’empêcher de penser que s’ils y croyaient vraiment, alors c’est un peu « bizarre » d’interpréter aujourd’hui la Genèse, ou les Textes dans leur ensemble, de manière allégorique, à l’inverse de l’interprétation qu’en donnaient les auteurs eux-mêmes, ou leurs contemporains.

Si le Livre Saint est ce sur quoi se fonde une religion, comment concilier le fait que la manière de l’interpréter évolue avec le fait que Dieu est immuable? Les auteurs de la Bible ne croyaient-ils pas au même Dieu que les Chrétiens actuels ? Et si le Livre Saint n’est pas ce sur quoi se fonde une religion, alors sur quoi se fonde une religion?

(suite…)

Fréquentes et astucieuses questions

Antheus, à propos d’une boutade sur le miracle en politique, revient sur ce que « croient » les uns et les autres, ici « les protestants libéraux ». Cela m’a donné l’idée de faire une FAQ.

Miracles

On 14 juin 2008 at 11:55 Anthaeus Said:
Je n’ai pas une grande culture, mais pour avoir lu quelques témoignages je sais que les protestants libéraux dont vous faites parties ne croient pas aux miracles. (Lourdes, Suaire de Turin, etc…)

Les protestants européens, d’une façon générale, ne se déterminent pas sur le « croire » (compris comme une obligation) mais sur le « libre examen« . Ils examinent donc avant d’adhérer.. Vous avez donc tout l’évantail d’adhésion avec plus ou moins de « mais ». Pour les libéraux, le volume de « mais » est plus important que chez les autres. Pourquoi n’y aurait-il qu’une recette pour accommoder la blanquette ? Ce serait triste !

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Published in: on 20 juin 2008 at 12:54  Comments (15)  

Quel avenir pour le protestantisme libéral ?

Dans le dernier numéro d’été d’Evangile et Liberté, Gilles Castelnau semble atterré par la désaffection de ses contemporains vis-à-vis du protestantisme libéral : « Les sites internet religieux se multiplient, la radio grand public France Inter a le samedi matin d’excellentes émissions théologiques, les rayons librairie de nos supermarchés regorgent d’ouvrages de spiritualité – mais pas de la nôtre. C’est frustrant ! Dans leur quête spirituelle et leur réflexion éthique nos contemporains ne se tournent plus vers nous et cherchent ailleurs. »

Castelnau croit voir dans les textes liturgiques et les lectures littéralistes la cause du problème. A la suite de John Spong, il appelle à une large diffusion de la théologie du Process qui « permet une notion de Dieu plus compréhensible à nos esprits modernes que le “théisme”  traditionnel », afin de gagner de nouveaux fidèles. Mais je m’interroge : quel est le public visé ? Castelnau mentionne le bouddhisme et les spiritualités New Age comme ses principaux rivaux, mais les taux de croissance des différentes églises évangéliques sont sans commune mesure avec celui des adeptes du Chemin octuple.

Arrêtez-moi si je me trompe, mais il me semble qu’il y a autant de rapport entre la théologie d’un Tillich et celle d’un pasteur pentecôtiste de la Bible Belt qu’entre la fusée Ariane et une sarbacane. Niveau marketing, que pèse Le Dynamisme créateur de dieu face à « Comment je me suis sortie de la prostitution grâce à ma relation personnelle avec Jésus » ? J’ai vraiment de gros doutes quant à l’orientation que Castelnau ou Spong souhaitent donner au Protestantisme libéral pour redresser la barre. A moins qu’ils ne s’adressent qu’à une élite éprise de théologie moderne, souriant aux démonstrations de « parler en langues »

On peut certes rétorquer qu’on a affaire avec ces mouvements à une théologie rustique et dépassée, mais force est de constater qu’elle est bien vivace. Pascal Boyer, dans son désormais classique « Et l’homme créa les dieux« , rapporte les résultats d’une expérience intéressante, montrant que les conceptions théologiques et les croyances quotidiennes d’un groupe de personnes ne sont pas forcément cohérentes entre elles. Par exemple, ces dernières renvoient en général spontanément une image très « personnelle » de dieu, même si la personne interrogée propose par ailleurs une théologie impersonnelle de la divinité.

Il est encore plus intéressant d’écouter le témoignage de l’auteur Richard Skinner :

« Le dieu de paille que Dawkins décrit puis démolit est malheureusement souvent proche de la notion du dieu dont nous, Chrétiens, donnons trop fréquemment l’impression de parler, de prier et d’adorer. Ce que Dawkins détruit dans son livre [The God Delusion] peut très bien n’être qu’une représentation inadéquate de dieu, mais c’est une représentation, une idole, que nous Chrétiens avons également trop souvent épousée comme la réalité. »

On peut être panenthéiste convaincu, tout en continuant à parler au « petit Jésus » au quotidien.

C’est sur ce second aspect, essentiellement émotionnel, de la « croyance » que jouent à fond les Evangéliques, avec un succès évident. C’est également cet aspect qui semble malheureusement faire défaut à l’approche de Gilles Castelnau, beaucoup trop intellectuelle à mon avis pour séduire tout un chacun.

>Ces quelques considérations ne constituent que l’avis superficiel d’un “outsider”, qui ne demande qu’à être détrompé.

Jeff

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André Comte-Sponville

Je vois nombre d’amateurs se précipiter sur le premier article recensant

Mais ce bouquin est si intéressant qu’il en a suscité d’autres :

Dès les prochains, je dirai en quoi ce bouquin me semble non seulement spirituel mais intéressant et à mettre entre toutes les mains toutes affaires cessantes. La première raison serait le nombre de bouquins qu’il m’a incité à rouvrir pour vérifier la pertinence des echos qu’il faisait retentir.

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